En 2023, une refonte de la réglementation sur l'utilisation des eaux impropres à la consommation humaine, et qui concerne donc toutes les eaux dites naturelles ou brutes comme l'eau de pluie, à été entamée.
La première partie de cette refonte a pris la forme du décret n° 2023-835 du 29 août 2023 qui veut simplifier "la procédure d'autorisation pour la réutilisation des eaux usées traitées et définir les conditions d'utilisation des eaux de pluie pour les usages non domestiques."
Ce décret a introduit une nouvelle section dans le Code de l'Environnement dédiée à l'utilisation de ces eaux.
Elle contient, alors qu'elle n'est sensée traiter que des usages non domestiques de l'eau de pluie, une mention concernant son usage dans les habitations, qui a suscité une inquiétude parmi une partie de la population d'usagers et des professionnels du secteur qui ont cru voir en elles les prémisses d'une interdiction de l'utilisation de l'eau de pluie par les particuliers.
Néanmoins cette section de la loi encadre bel et bien uniquement les usages non domestiques de l'eau de pluie, c'est à dire les usages dans les entreprises, les collectivités, les écoles, les hôpitaux... Elle ne restreint donc pas les usages privés de l'eau de pluie par les particuliers. La rédaction maladroite de cette section sera certainement adressée par le législateur.
La partie de la refonte qui concerne justement les usages de l'eau de pluie par les particuliers est en cours de rédaction.
Elle prendra la forme d'un décret et d'un arreté qui entreront en vigueur le 1er juillet 2024.
Alors d'ici là, que dit la loi?
Le socle juridique de la législation sur la collecte et l'utilisation domestique de l'eau de pluie pour les particuliers est vaste.
Il s'étale sur les Codes Civil, de l'Environnement, de la Santé et des Collectivités Territoriales ainsi que quelques arrétés notamment celui du 21 août 2008 relatif à la récupération des eaux de pluie et à leur usage à l'intérieur et à l'extérieur des bâtiments ou bien encore celui du 17 décembre 2008 relatif au contrôle des installations privatives de distribution d'eau potable, des ouvrages de prélèvement, puits et forages et des ouvrages de récupération des eaux de pluie. Il est dans certains cas complété par les Réglements Sanitaires Départementaux (RSD).
Il couvre ainsi tous les aspects de cette pratique, du droit fondamental d'accès à l'eau, aux mesures d'économies de la ressource en eau, aux mesures sanitaires et de sécurité, en passant par les conditions d'installation, de contrôle et d'utilisation des équipements.
Que faut-il savoir des fondements de la réglementation ?
Aux fondements de la réglementation de l'eau de pluie se trouve le droit universel d'accès à l'eau.
Il est établi dans l'article L210-1 du Code de l'Environnement qui place l'eau dans le patrimoine commun de la Nation, rappelle que l'usage de l'eau appartient à tous et que chaque personne a le droit d'accéder à de l'eau potable pour ses besoins hygièniques et de consommation.
En toute cohérence, l'article 641 du Code Civil établi donc le droit du propriétaire de collecter et utiliser l'eau de pluie qui tombe chez lui.
L'importance capitale de la ressource en eau pour l'alimentation de la population, l'agriculture, la pêche, l'environnement et l'économie informe les dispositions de la loi pour garantir sa bonne gestion.
C'est à ce titre que Le Grenelle de l'Environnement s'est donné en 2007 comme objectif de développer "la récupération et l’utilisation de l’eau de pluie dans le respect des contraintes sanitaires" avec en ligne de mire de "satisfaire à peu près les deux tiers de la consommation en eau domestique des usagers volontaires'.
Il a donné lieu notamment à l'arrêté du 21 août 2008 relatif à la récupération des eaux de pluie et à leur usage à l'intérieur et à l'extérieur des bâtiments qui contient encore aujourd'hui l'essentiel du cadre juridique de l'utilisation domestique de l'eau de pluie.
Il a été suivi 12 ans plus tard par la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire qui a introduit notablement l'article L211-1 du Code de l'Environnement qui encourage "la promotion d'une utilisation efficace, économe et durable de la ressource en eau" notamment "l'utilisation des eaux de pluie en remplacement de l'eau potable".
L'utilisation de l'eau de pluie n'est donc pas seulement autorisée, elle est encouragée.
Le troisième pilier de la réglementation sur l'utilisation de l'eau de pluie est sanitaire. Si la valorisation de l'eau de pluie est encouragée, il est essentiel qu'elle ne présente pas de risque pour la santé des utilisateurs.
L'eau de pluie, comme toutes les eaux brutes, ne peut être présumée potable tant qu'elle ne répond pas aux critères de qualité la rendant propre à la consommation humaine (Article L1321 du Code de la Santé). Elle peut contenir certains polluants en tombant du ciel puis être contaminée en ruissellant sur la toiture, dans les gouttières ou en étant stockée dans les citernes.
Notre guide sur l'eau potable détaille ses critères de qualité.
Il est donc impératif pour le législateur que l'eau de pluie non traitée ne soit pas consommée par les usagers. C'est la raison pour laquelle les usages domestiques autorisés pour cette eau quand elle n'est pas adaptée à la consommation humaine sont ceux où elle n'est pas risque d'être ingestée (toilettes, lavage du sol, arrosage du jardin…).
La loi fait néanmoins la distinction entre l'eau de pluie non traitée et celle qui auraient été traitée pour satisfaire les exigences de qualité de l'eau potable (Article 1 de l'arrêté du 21 août 2008, et article R211-124 du Code de l'Environnement relatif aux usages non domestiques de l'eau de pluie). Seule celle qui est utilisée "non traitée" est concernée par les restrictions que la loi impose.
Le particulier est autorisé à utiliser une eau de pluie traitée et rendue potable pour tout ses usages domestiques privés, au même titre qu'une autre source d'eau potable (réseau public d'eau potable, puit, forage…) Alinéa 2° de l'article L1321-7 du Code de la Santé Publique.
L'impératif sanitaire est par ailleurs à l'origine de la plupart des contraintes sur les équipements de collecte, de stockage et de distribution de l'eau de pluie, de l'impératif de déclaration de l'usage domestique de l'eau de pluie à l'intérieur des batiments, et des visites de contrôles des installations privées.
Pour s'assurer de respect de ces contraintes sanitaires, la loi délègue aux mairies le suivi et le contrôle des installations privées de récupération d'eau de pluie. L'usager doit déclarer à la mairie l'usage de l'eau de pluie à l'intérieur de son logement et pour sa consommation (article 2224-9 du code général des collectivités territoriales). Les agents du service d'eau potable peuvent procéder aux contrôle des installations privées de collecte d'eau de pluie (article L2224-12 du code général des collectivités territoriales).
L'utilisateur domestique de l'eau de pluie est soumis à un certain nombre de restrictions et d'obligations.
Nous l'avons expliqué : la réglementation française autorise l'utilisation domestique de l'eau de pluie non traitée et de l'eau de pluie potabilisée pour les particuliers. Mieux encore, elle l'encourage !
La loi française autorise que l'eau de pluie non traitée soit utilisée :
L'exception des toits en amiante-ciment ou plomb
L'eau de pluie collectée sur un toit en amiante-ciment ou en plomb ne peut être utilisée pour d'autres usages que ceux à l'extérieur du bâtiment.
L'utilisation d'une eau de pluie ayant été préalablement potabilisée est autorisée. Le particulier peut alors l'utiliser pour tous ses usages domestiques, au même titre que l'eau potable du réseau :
L'eau est considérée comme potable si elle est propre à la consommation, à l'hygiène corporelle, à l'hygiène générale et aux autres usages domestiques (article R1321-1 du Code de la Santé Publique). Pour être jugée comme telle, elle doit respecter les critères de qualité de l'eau potable établis dans la réglementation.
Pour comprendre tous les critères de qualité de l'eau potable, parcourez notre guide sur le sujet.
Le particulier faisant l'utilisation domestique de l'eau de pluie à l'intérieur de son habitation est soumis à un certain nombres d'obligations pour respecter les contraintes sanitaires mais aussi dans les cas de raccordement au réseau d'assainissement collectif, pour mesurer le volume d'eau apporté au réseau par les systèmes de collecte d'eau de pluie.
Le particulier souhaitant faire une utilisation de l'eau de pluie à l'intérieur de son logement ou pour sa consommation doit en faire la déclaration à la mairie.
Le réseau d'eau de pluie ne doit jamais être relié directement au réseau de distribution d'eau destinée à la consommation humaine.
Il ne doit pas pouvoir pouvoir le contaminer. Pour cela, l'installation doit contenir un système garantissant la disconnexion des deux réseaux qui previendra un éventuel retour d'eau polluée vers le réseau public d'eau potable. Le système préconisé est le système de disconnexion par surverse totale avec garde d'air visible qui est décrit par la norme NF EN 1717.
Les cuves de stockage de l'eau de pluie doivent être :
Pour un usage domestique de l'eau de pluie à l'intérieur de l'habitation :
Les canalisations de distribution d'eau de pluie non potable, ainsi que les robinets de soutirages et autres sorties (toilettes...) doivent indiquer que l'eau n'est pas potable. Les plaques de signalisation doivent faire figurer un pictogramme explicite ainsi que l'indication "Eau non potable". Pour les canalisations, le pictogramme seul suffit et doit être placé :
Le propriétaire est tenu d'entretenir régulièrement les équipements de récupération d'eau de pluie lorsque cette eau est utilisée à l'intérieur des batiments.
Semestriellement, le propriétaire doit effectuer une vérification:
Annuellement, le propriétaire doit effectuer :
Comme le prévoit l'arrêté du 17 décembre 2008, les agents du service public sont habilités à procéder à une visite de contrôle d'une l'installation de collecte d'eau de pluie . Cette visite à pour fonction de:
Cette visite de contrôle ne peut avoir lieu qu'une fois tous les 5 ans.
Oui ! La loi française autorise l'utilisation de l'eau de pluie pour la consommation humaine lorsque cette eau à été traitée et rendue potable. L'eau de pluie de pluie non traitée peut-être utilisée également pour certains usages domestiques (toilettes, lavage du sol…). Ces usages sont décrits plus haut dans cet article.
Oui, vous pouvez remplir votre piscine privée avec de l'eau de pluie ! Voilà encore une bonne raison de collecter l'eau de pluie.
La législation, à travers notamment les articles D1332-1 à D1332-9 et D1332-1 à D1332-11 du Code de la Santé, tout comme l'article R211-127 du Code de l'Environnement, encadre uniquement la qualité des eaux de baignades des piscines privées et publiques à usage collectif. Les piscines privées réservées à l'usage personnel de leurs propriétaires ou locataires ne sont pas soumises à ces réglementations et ne sont soumises à aucun contrôle sanitaire extérieur.
Cependant, il est important de comprendre les contraintes imposées sur la qualité des eaux des piscines collectives, car elles visent à protéger la santé des usagers.
La loi et la Direction Générale de la Santé considèrent à travers l'article L1321-1 du Code de la Santé qu'une eau impropre à la consommation humaine, c'est à dire non adaptée à l'alimentation et à l'hygiène corporelle, peut-être adaptée à la baignade. Un certain nombre critères de qualité de l'eau des piscines collectives sont néanmoins détaillés dans l'arrêté du 26 mai 2021 relatif aux limites et références de qualité des eaux de piscine.
Ces critères incluent le nombre ou la concentration de micro-organismes, bactéries comme l'E. coli ou autres substances qui, dans l' eau présentent un risque sanitaire pour les utilisateurs. Ils définissent également les paramètres physico-chimiques et sensoriels souhaités pour l'eau, tels que le pH, la température et la transparence.
En conclusion, bien que la loi ne vous l'impose pas, en utilisant l'eau de pluie ou une eau autre que celle du réseau public de distribution d'eau potable pour remplir votre piscine, il est essentiel de tester la qualité de l'eau et de la traiter si nécessaire afin d'éliminer tout risque pour votre famille et vos invités.
Oui, si le batiment est situé sur une voie raccordée au réseau de distribution public d'eau potable.
Dans la majorité des départements français, le Réglement Sanitaire Départemental prévoit dans l'article concernant la desserte des immeubles que dans le cas où un immeuble est desservi par une voie raccordée le réseau public d'eau potable, il doit alors s'y brancher et mettre cette eau à la disposition de ses habitants.
Déterminez votre potentiel de récupération de l'eau de pluie et dimensionnez votre système.